Faute grave pendant un arrêt de travail suite à accident du travail
Durant les périodes de suspension du contrat de travail consécutive à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, l’employeur ne peut rompre celui-ci que s’il justifie soit d’une faute grave de l’intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l’accident ou à la maladie (article L1226-9 du code du travail). Selon une jurisprudence du 20 février 2019, un basketteur professionnel commet une faute grave justifiant la rupture de son contrat de travail, en ne reprenant pas ses séances de kiné pendant son arrêt de travail consécutif à un accident du travail.
Le contexte de la faute grave pendant un arrêt de travail suite à accident du travail
Un salarié engagé en août 2013 comme basketteur professionnel par la JDA Dijon basket sous contrat à durée déterminée pour les saisons de 2013 à 2016 a eu un accident du travail.
Le salarié étant en arrêt de travail à la suite de son accident du 12/02/2015 au 19/02/2015, puis à nouveau entre le 18 mai et le 14 juin 2015, l’employeur a continué durant ces périodes à lui verser sa rémunération conformément à une clause du contrat de travail. Par lettre recommandées du 28 mai 2015 l’employeur a demandé au salarié de reprendre ses séances de kiné faisant partie de ses obligations de joueur professionnel. Toujours en arrêt de travail, le salarié n’a pas répondu aux demandes de son employeur et il n’a pas non plus repris contact avec le staff médical.
Son employeur a alors procédé à la rupture de son contrat de travail pour faute grave le 30 juin 2015.
La lettre de l’employeur mettant fin au contrat rappelle les faits, mais aussi que le contrat de travail indique que « le joueur devra soigner sa condition physique pour obtenir le meilleur rendement possible dans son activité. Il devra respecter strictement les instructions de tout membre de l’encadrement technique et du président du Club ». Pour conclure, l’employeur a indiqué que le salarié avait commis une faute grave rendant impossible son maintien dans le Club et qu’en conséquence il avait décidé la rupture anticipée du contrat de travail pour faute grave rendant impossible son maintien dans le Club.
Le contentieux prud’homal : La faute grave est-elle caractérisée pendant l’arrêt de travail suite à accident du travail ?
Le salarié a saisi la juridiction prud’homale suite à la rupture pour faute grave en contestant la validité de la rupture et en réclamant le paiement de dommages-intérêts.
Postérieurement à la rupture du contrat de travail, la presse a révélé que le basketteur avait signé le 7 juillet 2015 avec le club d’Orléans Loiret Basket. La JDA Dijon Basket a fait valoir que ce nouveau contrat avait donc été négocié alors que le basketteur était encore son salarié et qu’il avait donc délibérément décidé de ne pas se soumettre aux soins qui lui étaient prescrits et avait abandonné son poste à compter du 22 mai 2015.
Le conseil de prud’hommes considérant que les agissements du salarié constituaient une faute grave, a jugé que la rupture du contrat de travail était justifiée et l’a donc débouté de l’ensemble de ses demandes.
La Cour d’appel
La cour d’appel de Dijon a jugé que l’obligation pour le sportif professionnel prévue à son contrat de travail et dans la convention collective du basket « de se prêter aux soins nécessaires à la restauration de son potentiel physique en cas de blessure subsistait même durant la période d’arrêt de travail consécutive à un accident du travail » (arrêt de la Cour d’appel de Dijon du 30 mars 2017).
Le pourvoi en cassation
Le salarié a formé un pourvoi en cassation.
Selon le salarié, si la suspension du contrat de travail consécutive à une maladie professionnelle ou à un accident du travail ne fait pas obstacle au maintien d’une obligation de loyauté du salarié à l’égard de l’employeur, elle dispense selon lui « le salarié de son obligation de fournir sa prestation de travail, de sorte qu’il ne saurait être tenu, durant cette période, de poursuivre une collaboration avec l’employeur ».
L’arrêt de la Cour de cassation
La Cour de cassation a considéré que la cour d’appel avait « exactement retenu que la spécificité du métier de sportif professionnel obligeait le salarié, en cas de blessure, à se prêter aux soins nécessaires à la restauration de son potentiel physique ».
La Cour de cassation a ensuite relevé que la cour d’appel avait constaté que « pendant la période d’arrêt de travail consécutive à son accident du travail, le salarié n’avait pas honoré le rendez-vous destiné à organiser les séances de kinésithérapie prescrites par le médecin traitant de l’équipe et qu’il n’était pas demeuré à la disposition du kinésithérapeute pour suivre le protocole de soins ».
La Cour de cassation a, de ce fait, jugé que la cour d’appel avait bien « fait ressortir l’existence d’un manquement du salarié à son obligation de loyauté rendant impossible la poursuite du contrat de travail ». Considérant que l’argumentation du salarié n’était pas fondé, la Cour de cassation a, par ces motifs, rejeté son pourvoi.
(Cour de cassation, chambre sociale, 20 février 2019, N° : 17-18912)
Article rédigé par Pierre LACREUSE, Sciences-Po Paris, licence en droit et DESS Université de Paris I Panthéon- Sorbonne, ancien Directeur de la Gestion du personnel et des Relations Sociales, DRH, puis chef d’entreprise (PME), aujourd’hui Editeur juridique et relations humaines sur internet.
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