Quitter son travail et ne pas le reprendre

Jurisprudence de la Cour de Cassation : un ouvrier avait quitté son travail après une remarque de son employeur puis avait refusé de le reprendre à son retour, après un arrêt de travail, en raison d’une modification des conditions de travail. Selon le salarié il y aurait eu licenciement verbal. A l’époque la Cour a reconnu la faute grave et a constaté qu’il n’y avait pas eu licenciement. Aujourd’hui la démission aurait pu être présumée par l’employeur après mise en demeure du salarié. Mise à jour le 2 août 2023.

Le contexte de l’affaire et le contentieux prud’homal

A la suite d’un différend avec son employeur, un ouvrier tourneur avait quitté son travail. Après un arrêt de travail pour maladie, il s’y est présenté à nouveau six jours plus tard. Mais sans le reprendre effectivement.

Selon l’employeur : Le salarié avait abandonné son poste le jour du premier différent. De ce fait, il avait dû embaucher un remplaçant en contrat à durée déterminée. Et lorsque 6 jours plus tard le salarié était revenu, il lui avait proposé de reprendre son poste. Mais en doublage, ce que le salarié avait refusé.

L’employeur en était resté à constater l’abandon de poste sans rompre le contrat de travail du salarié. Pour sa part, le salarié affirmait avoir été licencié verbalement lorsqu’il était revenu à son travail après son arrêt maladie. L’accord sur les faits se limitait donc à l’absence du salarié à son retour et à l’inexistence d’une procédure.

Le salarié prétendait avoir été licencié

Le salarié affirmait que l’employeur l’avait licencié de manière illégitime et sans respect de la procédure de licenciement. Pour ce motif, il avait alors assigné son employeur. Et il réclamait le paiement d’une somme de 40 000 francs « à titre de dommages-intérêts pour licenciement illégitime, à tout le moins abusif ».

La Cour d’appel de Besançon a débouté le salarié

La Cour d’appel de Besançon avait débouté le salarié de toutes ses demandes et exerçant son pouvoir d’appréciation des éléments de fait, avait considéré que le salarié avait quitté son travail à la suite d’une remarque de son employeur ; puis qu’à son retour il avait refusé la modification d’horaire proposée par son employeur avant de quitter de son plein gré son entreprise. La cour d’appel indiquait même que cette modification des conditions de travail avait été imposée à l’employeur.

La cour d’appel avait cependant également indiqué que le salarié « pourrait prétendre à une indemnité pour non-respect de la procédure qui […] ne saurait être inférieure à un mois de salaire ; Mais devant l’inexistence d’une telle demande, la cour d’appel ne peut juger ultra petita » (c’est-à-dire : au-delà de la demande du salarié, parce qu’un juge ne peut pas accéder à une demande qui ne lui pas été présentée).

La cassation : l’employeur aurait pu licencier pour faute grave

Dans le cadre de son pourvoi en cassation, le salarié a fait grief à l’arrêt de la Cour d’appel de Besançon de l’avoir débouté de toutes ses demandes. Selon lui, elle avait méconnu « le sens clair et précis » de ses conclusions d’appel. Selon le salarié, la cour d’appel aurait constaté que l’employeur avait pris l’initiative de rompre le contrat de travail sans lui envoyer aucune convocation à un entretien préalable ni aucune lettre de licenciement. Aujourd’hui, il aurait pu dire que l’employeur ne l’avait pas mis en demeure (avant de constater sa démission).

Le salarié concluait qu’en refusant néanmoins de lui accorder une indemnité pour licenciement abusif, la cour d’appel n’avait pas tiré les conséquences légales de ses observations. Enfin concernant l’indemnité pour défaut de procédure, le salarié soutenait que ses conclusions faisaient état de l’irrégularité du licenciement.

La Cour de cassation a considéré que « la cour d’appel, exerçant son pouvoir d’appréciation des éléments de fait, a retenu que le salarié avait quitté son travail à la suite d’une remarque de son employeur, puis avait refusé de le reprendre compte tenu du changement des conditions d’exécution que cette attitude avait imposée à l’employeur ».

Rejet du pourvoi

Rejetant le pourvoi, la Cour de cassation a précisé que « le refus par le salarié de continuer le travail ou de le reprendre après un changement de ses conditions de travail décidé par l’employeur dans l’exercice de son pouvoir de direction constitue, en principe [à l’époque], une faute grave qu’il appartient à l’employeur de sanctionner [à l’époque] par un licenciement ; qu’à défaut d’un tel licenciement, le contrat n’a pas été rompu, de sorte que le salarié ne peut réclamer aucune indemnité » (Cour de cassation, chambre sociale,  20 octobre 1998 N° : 96-42296).

Selon la Cour de cassation, il n’y a pas eu de licenciement

Ainsi, selon l’arrêt de la Cour de cassation, plus clair que celui de la cour d’appel, il n’y a pas eu de licenciement et s’il y en avait eu un, l’employeur aurait pu [à l’époque] prononcer un licenciement pour faute grave. Si les faits s’étaient produits aujourd’hui, la Cour de cassation dirait probablement que l’employeur aurait pu mettre en demeure le salarié et sans reprise du travail, constater sa démission.

Source de la jurisprudence arrêt de la Cour de cassation : Legifrance.gouv.fr

Ce site gratuit est financé par la publicité, merci de nous soutenir.

Résumé : Un salarié avait quitté son poste. Puis après un arrêt de travail, il était revenu. Mais avait refusé de reprendre le travail du fait d’une modification des conditions de travail. La cour de cassation a clairement dit :

  • Qu’il s’agissait d’une faute grave et que l’employeur aurait pu prononcer un licenciement pour faute grave.
  • Mais que l’employeur s’étant abstenu de procéder au licenciement, il n’y avait pas eu rupture du contrat. De sorte que le salarié ne peut réclamer aucune indemnité.

.

Article rédigé par Pierre LACREUSE : Sciences-Po Paris, licence en droit et DESS Université de Paris I Panthéon-Sorbonne. Ancien Directeur de la Gestion du personnel et des Relations Sociales, DRH, puis chef d’entreprise (PME). Et dernièrement éditeur juridique et relations humaines sur internet.

Si vous avez été intéressé par cet exemple de jurisprudence de faute grave :

La rupture conventionnelle peut aussi vous intéresser.

Vous aimerez sans doute lire notre article : Faute grave : exemples

Mais peut-être préférerez vous rejoindre notre page : Abandon de poste et absences permettant d’accéder à d’autres jurisprudences sur les abandons de poste ou les absences.

A moins que vous ne préfériez choisir une autre catégorie de faute grave dans notre page : Exemples de jurisprudences de fautes graves.

Site conseillé pour une autre catégorie de licenciement : Le licenciement pour inaptitude.

@ Le site Licenciement pour faute grave est le 1er site complet d’expertise et conseil autour du licenciement pour faute grave et de la faute grave, ainsi que du licenciement pour faute lourde et de la faute lourde. Catégorie : Exemple de jurisprudences de faute grave. Article : Quitter son travail et ne pas le reprendre. Les mots clés sont : quitter son travail et ne pas le reprendre ; exemple de jurisprudences de faute grave ; abandon de poste et absence ; abandon de poste ; absence ; Cour de cassation ; jurisprudence faute grave.