La jurisprudence du licenciement pour faute grave
La jurisprudence permet de dire si un licenciement pour faute grave est justifié ou non. C‘est de la jurisprudence de la Cour de cassation que l’on tire de nombreux exemples de licenciements pour faute grave, ainsi que des motifs qui ne les justifient pas. Mais qu’est-ce-que la jurisprudence et dans quelle mesure est-elle suivie ? Que faut-il savoir sur les évolutions et revirements de la jurisprudence de la juridiction la plus élevée ?
Mais à propos, qu’est-ce-que la jurisprudence ?
La jurisprudence correspond à l’ensemble des décisions rendues, en France, par la Cour de cassation et de manière moins importante par les Cours d’appel. Les décisions rendues montrent comment un problème juridique a déjà été résolu et peut donc l’être de nouveau. Dans un sens plus étroit la décision rendue par la Cour de cassation concernant un problème juridique spécifique dans une affaire donnée X sera désignée par « la jurisprudence X ».
La jurisprudence est une source du droit. Elle vient compléter les lois en les interprétants à l’occasion des questions qui se posent. Une jurisprudence sera fortement établie lorsqu’elle émanera de la Cour de cassation, que la cour aura clairement affirmé un principe et confirmera par d’autres décisions similaires la position déjà prise. Si une jurisprudence remplie ces conditions et que les juridictions l’appliquent depuis longtemps, on parlera de jurisprudence constante.
La jurisprudence de la Cour de cassation a pour fonction d’uniformiser l’interprétation du droit. Ce faisant, elle évite la disparité des décisions des juridictions inférieures dans des affaires similaires. Les arrêts de la Cour de cassation donnent une orientation que les juridictions suivent le plus souvent. Parce que la voie a été montrée et parce que les juridictions inférieures souhaitent éviter les recours et les cassations.
Dans quelle mesure la jurisprudence est-elle suivie ?
Les juges du licenciement pour faute grave de première instance (Prud’hommes) et les Cours d’appel suivent généralement la jurisprudence de la Cour de cassation. Ils ne sont cependant pas tenus de la suivre. Et c’est le cas de la jurisprudence relative à la faute grave. En effet, une décision de justice, même prise par la plus haute juridiction, ne peut pas régler de manière obligatoire les questions de droit identiques pour des affaires à venir. Ceci résulte de l’Article 5 du Code civil, datant de 1803, qui édicte qu’ « il est défendu aux juges de prononcer par voie de disposition générale et réglementaire sur les causes qui leur sont soumises. »
Evolutions et revirements de la jurisprudence
Au fil des affaires examinées la jurisprudence se développe et évolue. C’est notamment le cas de celles concernant la faute grave et la faute lourde. Ainsi, complétant le travail du législateur, la Cour de cassation s’efforce d’être à l’écoute de la société française et européenne en adaptant l’interprétation du droit aux évolutions de la société. C’est pour cela que l’évolution de la jurisprudence passe par des infléchissements et des revirements.
Mais, ces revirements de jurisprudence sont difficiles à prévoir et, par ailleurs ils ont un effet rétroactif. La raison en est que la jurisprudence est une interprétation de la loi appliquée à des affaires et à des jugements antérieurs à cette interprétation. Ceci est important, car cela crée une relative incertitude sur le droit applicable. Ainsi, employeurs et salariés ne peuvent pas, dans bien des cas, être sûr qu’un licenciement pour faute grave sera considéré comme justifié ou non.
La Cour de cassation est particulièrement protectrice des salariés en cas de modification unilatérale par l’employeur du contrat de travail. Ainsi, par exemple, la jurisprudence de la Cour de cassation a indiqué que le licenciement pour abandon de poste du salarié n’est pas justifié, si celui-ci reproche à juste titre à l’employeur une modification unilatérale de son contrat de travail. Comme notamment le passage d’horaires de jour à des horaires de nuit (Cour de cassation, chambre sociale, 22 mai 2001, N° : 99-41146). Aussi, la qualification que donne la Cour de cassation des ruptures consécutives à des refus par des salariés de la modification du contrat ou des conditions de travail fournit un bon exemple de revirement de la jurisprudence concernant le licenciement pour faute grave.
Pour en savoir plus sur les revirements de jurisprudence, vous pouvez lire l’article revirement de jurisprudence licenciement pour faute grave.
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Article rédigé par Pierre LACREUSE, Sciences-Po Paris, licence en droit et DESS Université de Paris I Panthéon-Sorbonne, ancien Directeur de la Gestion du personnel et des Relations Sociales, DRH, puis chef d’entreprise (PME). Aujourd’hui Editeur juridique et relations humaines sur internet.
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