Critiquer dans un rapport

Un responsable informatique ayant formulé, dans un document remis au directeur général, des critiques de la politique menée par la direction informatique, allant jusqu’à préconiser l’éviction de ses responsables, avait été licencié pour faute grave. La cour de cassation s’est prononcée après la cour d’appel.

Le contexte du licenciement pour faute grave

Un cadre supérieur de la société Clemessy, exerçant les fonctions de chef du service de l’informatique technique depuis six ans, a remis un rapport au directeur général de la société, pour critiquer la politique menée par la direction informatique. Le document ne comportait ni termes injurieux ou diffamatoires.

Mais, en trois lignes, il faisait une critique appuyée des choix opérés par la direction des systèmes informatiques allant jusqu’à préconiser l’éviction de ses responsables. Par ailleurs, pour sa démonstration, le salarié s’était procuré des informations confidentielles par une intrusion dans des fichiers.

Devant cette critique qu’il a considéré excessive, l’employeur a décidé, le 27 janvier 1997, du licenciement pour faute grave de l’auteur du rapport.

Le contentieux : liberté d’expression ou faute grave ?

Dans un premier temps le jugement du Conseil des prud’hommes a donné satisfaction au salarié qui l’avait saisi. Mais ensuite, la Cour d’appel de Colmar a infirmé le jugement des prud’hommes (6 avril 2000).

Le salarié, se trouvant débouté de ses demandes en paiement d’un rappel de salaire au titre de sa mise à pied conservatoire et d’indemnités de rupture et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, s’est pourvu en cassation.

L’argumentation du salarié

Pour obtenir que l’arrêt de la cour d’appel soit cassé, le salarié a développé l’argumentation suivante :

1 / le fait qu’un cadre supérieur, ait formulé, auprès du directeur général, des critiques de la politique menée par la direction en matière informatique dans l’entreprise, dans un document ne comportant pas de termes injurieux, diffamatoires, ou excessifs (selon lui), en étant dans l’exercice de ses fonctions, ne peut pas constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement,  ni à fortiori une faute grave  ;

2 / la cour d’appel a dénaturé le rapport qu’il avait rédigé, en se fondant sur une seule citation de trois lignes figurant en épilogue, pour affirmer que ce rapport « ne constituait pas un simple audit technique favorisant une nouvelle donne informatique pour optimiser la production, mais s’analysait aussi en une critique appuyée des choix opérés par la direction des systèmes informatiques au point de préconiser l’éviction de ses responsables ».

La Cour de cassation confirme la faute grave

Rappelant que la cour d’appel avait relevé, « sans dénaturation, que le rapport envoyé […] à l’insu de son supérieur hiérarchique, au directeur général de la société, loin de se borner à contester la politique menée par la direction des systèmes informatiques et à préconiser de nouvelles orientations, recommandait l’éviction des responsables de ladite direction et comportait des informations confidentielles que le salarié s’était procurées, sans informer quiconque de sa démarche, par une intrusion dans des fichiers qui ne lui étaient pas accessibles… ».

La Cour de cassation a considéré que la cour d’appel « ayant dès lors caractérisé l’abus par le salarié de sa liberté d’expression, […] a pu décider que son comportement rendait impossible son maintien dans l’entreprise pendant la durée du préavis et constituait une faute grave ».

En conséquence de quoi, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi du salarié (Cour de cassation, chambre sociale, 1er octobre 2002, N°: 00-43543).

Source de la jurisprudence : arrêt de la Cour de cassation : Legifrance.gouv.fr

Résumé : Un salarié, cadre supérieur de l’informatique, avait critiqué la politique informatique menée par sa hiérarchie, allant jusqu’à en  recommander l’éviction.  Pour la cour de cassation, il y a eu en l’espèce abus de la liberté d’expression et le comportement du salarié constituait une faute grave.

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Article rédigé par Pierre LACREUSE, Sciences-Po Paris, licence en droit et DESS Université de Paris I Panthéon- Sorbonne, ancien Directeur de la Gestion du personnel et des Relations Sociales, DRH, puis chef d’entreprise (PME), aujourd’hui Editeur juridique et relations humaines sur internet.

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