Transaction après licenciement pour faute grave
Lorsqu’une transaction est signée après un licenciement pour faute grave, il peut en être déduit que l’employeur a abandonné la notion de faute grave. Dans ce cas, à la suite d’un contrôle, l’URSSAF procèdera à un redressement. Elle considérera, en effet, que la première partie du montant versée par l’employeur à titre d’indemnité transactionnelle globale correspond à l’indemnité compensatrice de préavis. Or des cotisations sociales sont dues sur cette indemnité. Jurisprudence de la Cour de cassation du 4 avril 2019.
Les suites de la transaction après licenciement pour faute grave
La transaction après licenciement pour faute grave
La société a signé une transaction le 14 novembre 2012 avec un salarié qu’elle avait licencié pour faute grave, un mois plus tôt. Cette transaction mettait fin au litige que le salarié envisageait d’introduire devant le conseil de prud’hommes. Elle avait, selon ses termes, pour objet « de réparer le préjudice moral, professionnel et financier subi par le salarié du fait de la rupture de son contrat de travail ».
Une indemnité de 90 000 €uros a été attribuée au salarié en contrepartie de son renoncement à tout recours et d’une reconnaissance de l’existence d’une cause réelle et sérieuse à son licenciement.
Le contrôle et le redressement par l’URSSAF
L’URSSAF a procédé à un contrôle de la société Travaux du Midi Var portant sur les années 2011 à 2013. A la suite de ce contrôle, l’URSSAF Provence-Alpes-Côte d’Azur a notifié à la société une lettre d’observations. Celle-ci a été suivie d’une mise en demeure le 10 décembre 2014. Le redressement notifié par l’URSSAF portait sur différents motifs, dont la requalification de l’indemnité transactionnelle.
C’est ainsi que l’URSSAF a considéré que la transaction annulait le caractère de faute grave du licenciement. A l’appui de cette analyse, il faut souligner que l’employeur avait versé une grosse indemnité au salarié et que d’autre part le salarié reconnaissait l’existence d’une cause réelle et sérieuse au licenciement et non une faute grave. De ce fait, elle a réintégré dans l’assiette des cotisations et des contributions sociales un montant équivalent à l’indemnité de préavis auquel le salarié pouvait prétendre en l’absence d’une faute grave.
Le contentieux de sécurité sociale consécutif au redressement par l’URSSAF
La société Travaux du Midi Var, contestant l’ensemble du redressement, a saisi la juridiction de sécurité sociale.
La cour d’appel a débouté la société Travaux du Midi Var. Elle a, en effet, considéré que la transaction et la reconnaissance par le salarié d’une cause réelle et sérieuse au licenciement démontraient incontestablement l’abandon par l’employeur de la notion de faute grave privative de tout droit à indemnité.
La société débouté, faisant grief à l’arrêt de valider le redressement relatif aux sommes payées en exécution de la transaction, a formé un pourvoi en cassation.
L’arrêt de la Cour de cassation
Ce qui résulte de l’article L 242-1 du code de la sécurité sociale
La Cour de cassation a considéré « qu’il résulte des dispositions […] de l’article L 242-1 du code de la sécurité sociale que les sommes versées au salarié lors de la rupture du contrat de travail autres que les indemnités mentionnées au dixième alinéa, [* …] sont comprises dans l’assiette de cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales, à moins que l’employeur ne rapporte la preuve qu’elles concourent, pour tout ou partie de leur montant, à l’indemnisation d’un préjudice ».
* dixième alinéa de l’article L 242-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable à la date d’exigibilité des cotisations litigieuses ; au 7° du II du même article en 2019.
Large rappel des considérants de la cour d’appel
La Cour de cassation a également considéré le fait que l’arrêt de la cour d’appel avait retenu :
- que le salarié avait été licencié pour faute grave
- et que, malgré la qualification de faute grave donnée au licenciement, une transaction a été signée moins d’un mois après celui-ci et que le salarié y a reconnu le caractère réel et sérieux du licenciement, « mais qu’en dépit de cette reconnaissance et pour éviter un recours prud’homal, l’employeur désirait réparer le préjudice moral, professionnel et financier subi par le salarié du fait de la rupture dans des conditions qui démontraient incontestablement l’abandon par l’employeur de la notion de faute grave privatrice de tout droit à indemnité, de telle sorte que le versement d’une indemnité transactionnelle globale comportait nécessairement l’indemnité compensatrice de préavis sur le montant de laquelle les cotisations étaient dues ».
Constat de l’absence de preuve que la totalité de l’indemnité compensait un préjudice pour le salarié
Sur la base de ces considérations, la Cour de cassation a conclu que : « de ces constatations relevant de son pouvoir souverain d’appréciation de la valeur des éléments de fait et de preuve débattus devant elle, faisant ressortir que la société ne rapportait pas la preuve que l’indemnité litigieuse compensait pour l’intégralité de son montant un préjudice pour le salarié, la cour d’appel a exactement déduit que la somme en cause entrait dans l’assiette des cotisations sociales ».
Par conséquent, la Cour a décidé que la cassation n’avait pas lieu d’être sur cette partie du pourvoi (Cour de cassation, chambre civile 2, 4 avril 2019, N° : 18-12898).
Conclusion :
Lorsque l’employeur et le salarié signent une transaction après la rupture du contrat de travail, il est prévu une indemnité pour le salarié. Pour qu’il y ait exonération des cotisations sociales sur tout ou partie de la somme versée au salarié l’employeur doit prouver qu’il s’agit de l’indemnisation d’un préjudice.
Lorsqu’il s’agit d’une transaction après un licenciement pour faute grave, les juridictions de la sécurité sociale considèrent assez facilement que l’employeur a renoncé à la faute grave. Si de surcroit le salarié reconnait l’existence d’une cause réelle et sérieuse et non la faute grave, cela renforce cette analyse. Enfin, l’importance du montant de l’indemnité (90 000 €uros dans cette affaire) semble absolument incompatible avec une faute grave.
S’il ne s’agit plus d’une faute grave, un préavis, ou une indemnité compensatrice de préavis, est dû au salarié. Or, l’indemnité de préavis est soumise aux cotisations sociales. Si elles n’ont pas été payées, l’URSSAF notifiera donc un redressement.
La nouvelle jurisprudence de la Cour de cassation du 4 avril 2019 a rappelé cette règle à la suite d’un contrôle URSSAF dans une entreprise qui avait signé une transaction après un licenciement pour faute grave.
Article rédigé par Pierre LACREUSE, Sciences-Po Paris, licence en droit et DESS Université de Paris I Panthéon- Sorbonne, ancien Directeur de la Gestion du personnel et des Relations Sociales, DRH, puis chef d’entreprise (PME), aujourd’hui Editeur juridique et relations humaines sur internet.
Sources : Article L 242-1 code du de la sécurité sociale versions en décembre 2012 et en 2019 ; jurisprudence de la Cour de cassation Légifrance.gouv.fr.
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