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Le licenciement amiable
Le licenciement amiable existe sous différentes formes : rupture conventionnelle du CDI, licenciement pour faute grave arrangé, rupture amiable du CDD. Pourquoi les puristes du vocabulaire juridique disent ils que le licenciement amiable n’existe pas, alors que dans les faits, il y en a beaucoup ? Pourquoi salariés et employeurs peuvent le souhaiter ? Explications du rôle que continue à jouer le licenciement pour faute grave dans les licenciements amiables, malgré l’existence de la rupture conventionnelle du CDI ?
Mis à jour le 6 juillet 2023.
Le licenciement amiable existe-t-il ?
Pourquoi les puristes du vocabulaire juridique disent-ils que le licenciement amiable n’existe pas ?
Pour comprendre ce que soutiennent les puristes du droit, il faut comprendre que dans le code du travail sont exposées les différentes formes de rupture du contrat de travail et qu’effectivement on n’y trouve pas ce que l’on appelle pourtant communément un licenciement amiable.
Selon le droit du travail, le licenciement est un mode de rupture à l’initiative de l’employeur qui en décide seul et la démission le mode de rupture normal par le salarié.
Par ailleurs, existent des possibilités de rupture judiciaire, ou de prise d’acte de la rupture, qui sont très peu utilisés. Car elles conduisent devant les juges et sont assez risquées pour la partie qui en prend l’initiative.
Depuis quelques années existe un mode de rupture amiable du CDI : la rupture conventionnelle de CDI, qui n’est juridiquement ni un licenciement, ni une démission.
Concernant les CDD, le licenciement et la démission n’existent pas, même si l’employeur peut rompre le CDD, notamment pour faute grave ce qui est très proche du licenciement pour faute grave *. Mais, un accord de rupture amiable du CDD entre l’employeur et le salarié est possible. Il peut ouvrir droit aux allocations de chômage de Pôle Emploi, comme la convention de rupture de CDI, à la condition que la rupture soit prévue sous forme d’un avenant qui modifie le terme du contrat. Le “terme du contrat” sera ainsi le motif indiqué à Pôle Emploi.
En fait, il y a beaucoup de « licenciements amiables »
Alors pourquoi si en droit le licenciement amiable n’existe pas, parle-t-on quand même de licenciement amiable ? Et pourquoi dit-on qu’il y en a beaucoup ?
En fait, le licenciement amiable est une solution trouvée, depuis fort longtemps, par les employeurs pour pouvoir s’entendre (en dehors du cadre des règles juridiques) avec leur salarié sur une rupture du contrat de travail. Cet arrangement entre l’employeur et le salarié vise à permettre une rupture du contrat de travail ouvrant la possibilité au salarié de bénéficier des allocations de chômage. Mais, sans qu’il s’agisse ni d’un licenciement pur et dur, ni d’une démission.
La rupture conventionnelle d’un CDI, qui ouvre droit aux allocations de pôle emploi, a été créée en 2008 par le législateur pour éviter que soient nécessaires les licenciements amiables. Mais, si la rupture conventionnelle a réduit le nombre de licenciements amiables arrangés, elle ne les a pas supprimés. Ceci s’explique par le fait que le législateur a prévu l’obligation d’une indemnité de rupture au moins égale à l’indemnité de licenciement pour une rupture conventionnelle. Et que quand c’est le salarié qui veut partir, l’employeur n’accepte pas forcément de payer pour un départ qu’il ne souhaitait pas.
Par ailleurs, certains englobe encore, dans le langage des non-juristes, la convention de rupture amiable d’un CDI dans les « licenciements amiables ».
Pourquoi un « licenciement amiable » ?
Trois types de situation vont conduire à une rupture ou licenciement amiable :
1 – Le salarié souhaite quitter l’entreprise
Le salarié souhaite quitter l’entreprise, mais veut pouvoir bénéficier d’allocations de chômage. Il demande donc à son employeur, une rupture conventionnelle ou un licenciement.
Souvent l’employeur ne veut rien payer, car il n’est pas demandeur de la rupture du contrat de travail. Or celle-ci va le pénaliser, car elle va lui coûter du temps. En effet, il va devoir recruter et retrouver un salarié compétent n’est souvent pas facile. De plus, lorsqu’il aura trouvé nouveau salarié, ce dernier va mettre un certain temps à être vraiment opérationnel. Et puis, l’employeur pense que si son salarié veut partir, il n’a qu’à démissionner, ce qui est la normale.
Cependant, soit par sympathie, soit parce le salarié fait comprendre à son employeur trop réticent qu’il va le regretter… l’employeur va souvent finir par accepter une sorte de licenciement amiable.
2 – L’employeur souhaite se séparer de son salarié
L’employeur souhaite se séparer de son salarié, pour un motif personnel ou économique. Mais il voudrait éviter de faire un licenciement pur et dur.
Le licenciement : c’est compliqué et cela prend beaucoup de temps. Il faut invoquer un ou des motifs solidement formulés, pour lesquels il faudra avoir des preuves solides. Cela va être conflictuel et donc créer un certain trouble dans l’entreprise et parfois humainement l’employeur ne souhaite pas le conflit avec son salarié. Après il y a un risque important de procédure aux prud’hommes par le salarié, avec un côté très aléatoire du résultat même quand le licenciement est justifié. Et cela va encore représenter du temps, alors que l’employeur a bien d’autres choses à faire, plus un risque financier.
Donc, pour ces raisons l’employeur propose au salarié une solution amiable.
3 – L’employeur et le salarié souhaitent se séparer
L’employeur comme le salarié pensent que les choses ne vont plus, qu’ils n’ont plus envie de travailler ensemble. Alors, comme dans les couples qui finissent par divorcer après avoir longtemps hésité, chacun accumule des griefs plus ou moins sérieux contre l’autre, en se le disant sans que l’autre comprenne, ou sans le dire. Et, de ce fait, l’incompréhension grandie.
Il y a alors trois solutions : soit l’employeur décide de licencier, soit le salarié décide de démissionner. Mais, s’il s’agit d’un CDD, le licenciement et la démission sont impossibles. Et démissionner est difficile à décider, en période de chômage important, pour le salarié, s’il n’a pas déjà trouvé un autre emploi.
La solution est donc que les deux s’entendent sur une solution amiable.
Quelles sont les formules de rupture ou licenciement amiable ?
Le choix de la meilleure solution va dépendre de l’ancienneté du salarié, de qui veut la rupture, de la bonne ou de la mauvaise entente entre ce salarié et son employeur et de l’appréciation du risque par l’employeur.
Plusieurs solutions de rupture amiable existent :
La rupture conventionnelle du contrat à durée indéterminée (CDI)
En cas de CDI, il y a depuis 2008, la rupture conventionnelle du contrat à durée indéterminée (CDI). Celle-ci est une formule prévue par les articles L. 1237-11 à L. 1237-16 du Code du travail. En fait, dans l’esprit du législateur la rupture conventionnelle devait prendre la place du licenciement amiable. Car elle ouvre droit aux allocations de chômage, dans les mêmes conditions que le licenciement.
La rupture conventionnelle intervient après une homologation à l’inspection du travail (1) et respecté deux délais. Le premier délai est de 15 jours calendaires Mais certains trichent en antidatant le document. Et le second délai est de 15 jours ouvrables qui se comptent à partir de la réception du formulaire bien rempli par la Direccte (2). Il ne faut pas oublier de compter le délai postal et espérer qu’une grève ne survienne pas à la poste. Mais, en général, l’homologation n’est qu’un contrôle administratif de forme. Même si les employeurs peuvent craindre d’être ennuyés s’ils ont déjà fait un certain nombre de rupture conventionnelle.
La rupture conventionnelle convient souvent mais pas toujours
Ce mode de rupture semble convenir lorsque c’est l’employeur qui veut la rupture. Dans ce cas, les deux parties pourront s’entendre sur une plus forte indemnité que celle normalement prévue. En échange, le salarié n’ira pas contester le licenciement en justice et l’employeur aura évité les remous au sein de l’entreprise. Ainsi, lorsque les deux parties souhaitent la rupture, la convention de rupture amiable joue son rôle prévue par le législateur.
Mais, ce n’est pas le cas le plus fréquent. En effet, comme l’employeur doit verser au salarié une indemnité au moins égale à celle de licenciement, les employeurs n’en veulent souvent pas. Et lui préfère encore l’ancienne formule du licenciement amiable, lorsque c’est le salarié qui veut partir.
Le licenciement pour faute grave, ou autre, complété par une transaction
En pratique, l’employeur et le salarié se mettent d’accord sur un motif acceptable par les deux parties et sur les conditions de la rupture. Le motif d’abandon de poste était souvent retenu, mais désormais celui-ci ne constitue plus une faute grave que pour les CDD. Pour les CDI, le législateur a instauré une présomption de démission entrée en vigueur en 2023. Or la démission ne permets pas de bénéficier des allocations de chômage (sauf exception).
Mais, d’autres motifs de faute grave que l’abandon de poste peuvent être utilisés… Et ils ont l’avantage d’aller plus vite.
En pratique, le DRH monte tout le dossier. Puis, sauf si le motif est l’abandon de poste, les parties signent d’abord une transaction postdatée. L’employeur, ou un intermédiaire (avocat ou huissier) la conserve dans un premier temps, jusqu’à la date indiquée. Ensuite une lettre de convocation à entretien préalable est envoyée. Ou (en dehors du motif abandon de poste), pour aller plus vite, la convocation est antidatée et annotée comme reçue en main propre par le salarié. Enfin la lettre de licenciement est envoyée en lettre recommandé (à une date antérieure à celle figurant sur la transaction). En résumé, tout est fait à l’envers par rapport à un fonctionnement juridiquement orthodoxe, pour que chacun soit rassuré.
L’avantage du licenciement amiable est que l’employeur et le salarié, décident ensemble des conditions de la rupture. S’il n’y avait pas des aspects contraires au droit du travail, on pourrait dire que les deux parties se sentent libres de décider ensemble. Si c’est le salarié qui est demandeur et veut partir en ayant des droits aux allocations de chômage, les deux parties pourront se mettre d’accord sur un licenciement amiable très rapidement.
La rupture amiable du CDD
Pour les CDD, la rupture amiable du CDD existe. Mais, il ne s’agit pas d’une rupture conventionnelle pour le CDD. En pratique, la rupture se fait sous la forme d’un avenant qui modifie le terme du contrat. Cette rupture peut ouvrir droit aux indemnités de chômage, à la condition que le salarié remplisse les conditions de durée de cotisation.
Une seconde formule est aussi utilisée. En effet, assez souvent, l’employeur n’est pas demandeur du départ du salarié. De plus, il peut ne pas vouloir payer l’indemnité de précarité. La rupture du CDD pour faute grave peut, alors, remplir le même rôle que le licenciement pour faute grave servant de licenciement amiable pour le CDI.
Cependant, sauf pour les CDD dont le terme est vraiment lointain, l’utilité d’une solution amiable est assez limitée.
Les risques du licenciement amiable
Si la plupart de licenciements amiables se passent bien, le licenciement amiable n’est pas sans risques. Et, ceux-ci sont grandissants. Il importe donc de les connaître, avant de décider et de systématiquement prendre un certain nombre de précautions.
Article rédigé par Pierre LACREUSE : Sciences-Po Paris, licence en droit et DESS Université de Paris I Panthéon- Sorbonne. Ancien Directeur de la Gestion du personnel et des Relations Sociales, DRH, puis chef d’entreprise (PME). Et dernièrement Editeur juridique et relations humaines sur internet.
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Questions/réponses concernant le licenciement amiable
Inaptitude et licenciement amiable, forme d’un licenciement pour faute avec un chèque à encaisser plus tard
Mon père a été déclaré inapte à son travail. Et une liste d’emplois non compatibles a été dressés (pas de marche plus de 2h, pas d’accroupissement etc.). Il travaille en usine de méthanisation et incinération depuis plus de 35 ans. Et est à un an de sa retraite (60 ans), car il a tous ses trimestres… Bref son employeur au lieu de le licencier pour inaptitude et impossibilité de reclassement, veut le licencier pour faute suite à une sanction disciplinaire (fausse). Il lui offrirait en plus de sa prime de départ un chèque à n’encaisser qu’après 3 mois de licenciement. Mais mon père doit signer une feuille comme quoi il accepte de ne faire aucun recours en justice.
Que faire ? Nous voulons refuser et attendre un licenciement pour inaptitude. Mais, mon père a-t-il le droit de refuser un congé de formation, ou poste administratif, sans refus abusif ??? Bien cordialement dans l’attente de vous lire
Admin
Un licenciement amiable suppose l’accord du salarié
Bonjour,
Pour qu’il y ait un licenciement amiable, il faut qu’il y ait un accord du salarié avec l’employeur. Il faudrait évidemment que votre père se défende, si jamais son employeur le licenciait pour une faute imaginaire, en dehors d’un arrangement amiable. Voir comment se défendre–prud’hommes. En outre, votre père devrait déterminer combien il percevrait s’il est licencié pour inaptitude pour apprécier où est son intérêt. Voir Indemnité de licenciement pour inaptitude. Et ce n’est pas pareil selon que l’inaptitude est d’origine professionnelle, ou non professionnelle.
En fait, il est probable que l’employeur préfère un licenciement amiable parce que cela doit lui coûter moins cher. Il se peut aussi que l’employeur fasse traîner la recherche d’un reclassement et préfère payer le salaire jusqu’à la retraite.
Son but peut être de ne pas procéder à un licenciement pour inaptitude, si cela lui coute plus cher. Je vous conseille la lecture de l’article Refus du reclassement par le salarié inapte. Comme vous verrez un salarié en inaptitude peut toujours refuser un reclassement. Mais dans certains cas il n’y a pas de conséquence et dans d’autres cas le salarié perd en indemnité.
Admin
L’employeur ne peut pas obliger son salarié à prendre un congé de formation. Par contre un employeur peut imposer une formation dans le cadre du plan de formation payé par l’entreprise. Mais dans ce cas la formation doit être compatible avec les recommandations du médecin du travail. Elle peut viser à favoriser le reclassement. Bien cordialement.
Une solution amiable est préférable pour un salarié qui veut être rapidement libéré.
Sissi
Bonjour,
Quel est le moyen de rupture d’un CDI le plus rapide ? J’ai trouvé un autre travail et je voudrais quitter mon entreprise assez rapidement ?
Merci.
Admin
Bonjour,
Le plus simple quand on veut quitter son emploi dans son entreprise est de démissionner. Sachez qu’il est possible de demander à ne pas effectuer le préavis ou à le raccourcir. Vous pouvez le faire oralement avant de démissionner par écrit.
Votre employeur est en droit de refuser. Mais un employeur accepte souvent à la condition que ce soit clairement à votre demande et qu’il ne vous paie pas le préavis non effectué. L’employeur préfère généralement cette solution, plutôt que vous fassiez une faute grave pour l’obliger à vous licencier. De fait, une solution amiable est souvent préférable pour les deux parties.
Cordialement.
L’employeur ne fait pas de rupture conventionnelle de CDI. Il ne fait que des licenciements amiables sous forme de licenciements pour faute grave arrangés…
Trayssac
Étant salariée depuis 32 ans dans un grand magasin (cdi), j’ai demandé à mon patron une rupture conventionnelle de contrat. Celui-ci me dit que ça n’existe pas et que notre maison ne fait que des licenciements à l’amiable pour faute grave. A-t-il le droit ? Les indemnités seraient moindres pour moi en passant par ce système-là ?
Admin
L’employeur a droit de refuser une rupture conventionnelle
Bonjour,
La rupture conventionnelle de CDI existe évidemment et votre patron ne peut l’ignorer. Par contre, il a parfaitement le droit de ne pas vouloir en conclure. Sa position s’explique par la même raison que celle qui vous fait préférer cette formule de rupture amiable : l’employeur est obligé de verser une indemnité de rupture amiable (au moins) équivalente à l’indemnité de licenciement. Or, si c’est vous le salarié qui voulez partir, votre employeur considère qu’il ne vous doit rien, si vous voulez quitter l’entreprise. Contrairement à ce que beaucoup de salariés ont en tête, les indemnités de licenciement ne sont pas un droit capitalisé au fil des ans.
Si un salarié veut quitter son emploi, la normale est qu’il démissionne. Sauf à être certain d’avoir immédiatement un emploi salarié derrière, les salariés veulent pouvoir bénéficier du chômage au plus vite. Pour cela, plutôt que de démissionner, les salariés préfèrent une rupture à l’amiable. Rupture conventionnelle, ou licenciement amiable sous forme d’un licenciement pour faute grave arrangé à l’amiable.
Votre employeur ne veut pas de rupture conventionnelle parce que c’est vous et non lui qui veut la rupture. Par conséquent, vous avez le choix entre la démission et accepter le licenciement amiable sous la forme d’un licenciement pour faute grave à l’amiable, qu’il vous propose pour vous rendre service. Sauf cas exceptionnel, il n’y a ni préavis ni indemnité de licenciement pour faute grave. Vous trouverez toutes les explications que vous pouvez souhaiter sur ce site.
Bien cordialement.
Contrairement à la rupture conventionnelle, la démission ne donne pas droit à indemnités de rupture.
Sylla
Je suis dans une entreprise de sécurité de gardiennage depuis 2009 et maintenant j’ai mon CDI. Je viens de décrocher un nouvel emploi, mais je suis confus. Est-ce que si je démissionne j’aurai une indemnité de la part de l’entreprise sans faire aucune faute ? Aidez-moi svp.
Admin
Bonjour,
La démission ne donne droit à aucune indemnité. Celle-ci n’est due que pour les licenciements (sauf ceux pour faute grave, ou faute lourde), ou en cas de rupture conventionnelle du CDI (rupture amiable). Si vous démissionnez, vous aurez simplement droit à l’indemnité compensatrice des congés payés non pris. De votre côté vous devrez faire le préavis, à moins que votre employeur n’accepte de vous en dispenser.
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