Injurier un client et le menacer
Un inspecteur en nettoyage industriel, a été licencié pour faute grave pour avoir injurié et menacé un client de l’entreprise. Selon le salarié, son licenciement pour faute grave serait intervenu dans un contexte de harcèlement moral qu’il aurait subi. La Cour de cassation considérant qu’injurier un client et le menacer constitue une faute grave a cassé l’arrêt de la cour d’appel. Celle-ci avait fait primer le contexte sur les faits fautifs.
Le contexte du licenciement pour faute grave
Un salarié inspecteur en nettoyage industriel en contact avec la clientèle avait refusé une nouvelle affectation pour une question d’horaires. Et selon lui, depuis cinq à six mois il était victime de harcèlement moral par son responsable hiérarchique. Dans la même période, il avait eu 20 jours d’arrêt de travail pour état dépressif. L’affectation n’étant, toujours selon lui, « qu’un exemple de plus ». Ensuite, l’employeur avait attiré son attention sur l’extrême gravité de cette accusation en lui demandant d’indiquer des faits précis… Bref, la relation était manifestement conflictuelle entre le salarié et son employeur.
Dans les semaines suivantes, l’employeur, a appris que le salarié avait, injurié un client de l’entreprise. Cela s’était produit cinq mois plus tôt, environ trois mois avant son refus d’affectation. Le salarié avait, en effet, dit : « Si je ne m’étais pas retenu, je t’aurais mis mon poing dans la gueule ».
L’employeur a alors mis en oeuvre une procédure de licenciement pour faute grave à l’encontre du salarié. La lettre de licenciement pour faute grave indiquait comme motif le fait d’avoir injurié un client de l’entreprise. Et elle mentionnait d’autres griefs, dont les accusations du salarié à l’égard de sa hiérarchie.
La contestation du salarié
Le salarié a alors saisi la juridiction prud’homale pour contester le licenciement pour faute grave en affirmant avoir été victime de harcèlement moral du chef d’établissement, qui était son supérieur hiérarchique.
Le salarié argue d’un harcèlement
Pour prouver ses dires devant la cour d’appel, il a fourni à la cour deux attestations crédibles de personnes sans lien particulier avec lui :
- L’une, d’un gérant d’entreprise qui indiquait avoir entendu, huit mois avant le licenciement, en voiture. L’inspecteur en nettoyage avait demandé par téléphone à son supérieur des consignes pour faire face à un manque de personnel. Il lui avait été répondu d’un ton menaçant « fais ton métier d’inspecteur et arrête de faire ton cador ». Puis il avait ajouté « je suis ton homme si tu veux » (ce qui sous-entendait : pour se battre).
- L’autre, d’une ancienne stagiaire. Selon celle-ci, le chef d’établissement lui avait dit (quatre mois avant le licenciement) qu’il souhaitait licencier le salarié, mais qu’il ne le pouvait pas car « cela lui coûterait de l’argent ».
Le salarié licencié indiquait que son refus de l’affectation litigieuse s’expliquait surtout parce qu’elle lui avait été annoncée par lettre recommandée avec avis de réception. Il considérait cela comme inutilement autoritaire.
Par ailleurs, le salarié affirmait qu’un nombre importants d’heures suppléme
ntaires ne lui étaient pas payées.
La cour d’appel : « licenciement sans cause réelle et sérieuse »
L’affaire a été portée devant la Cour d’appel d’Orléans. Dans son arrêt, celle-ci a dit que le licenciement du salarié était sans cause réelle et sérieuse. Et elle a condamné l’employeur à lui verser des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle, l’indemnité de licenciement, le remboursement de la mise à pied conservatoire, le préavis et des congés payés afférents à ces deux périodes. Elle a, en outre, condamné l’employeur à rembourser un mois d’indemnité de chômage perçu par le salarié des Assedic. La motivation de l’arrêt de la cour d’appel, reposait sur :
Selon la cour d’appel, si le contexte « ne suffisait pas à caractériser un harcèlement moral », comme le prétendait le salarié, les accusations du salarié à l’égard de sa hiérarchie n’était qu’une « erreur de qualification ». Et selon la cour d’appel, cette « erreur » ne constituait ni une faute grave, ni même une cause sérieuse de licenciement.
La cour d’appel a considéré crédible la version du salarié
Selon la cour d’appel :
Les propos tenus par le salarié à un client de l’entreprise étaient établis (témoignage écrit du client et non contestation à l’audience par le salarié licencié lui-même). Mais, les fonctions du témoin dans une organisation patronale, lui faisait bien connaître les relations employeur / salarié. De ce fait, selon la cour d’appel, il était donc parfaitement à même d’apprécier si le comportement d’un salarié nécessitait ou non une réaction. En conséquence, s’il avait pris au sérieux les menaces du salarié licencié, il n’aurait pas attendu plusieurs mois pour s’en plaindre, mais aurait réagi immédiatement.
Ainsi la version du salarié licencié, selon laquelle ses propos n’étaient qu’une « plaisanterie vis-à-vis de quelqu’un qu’il tutoyait n’était nullement fantaisiste et il existait au moins un doute sur la réalité et sur le sérieux de ces menaces ».
La cour d’appel a retenu deux autres points en faveur du salarié
En outre, la cour d’appel considérait que l’attestation du responsable hiérarchique indiquant que le client se serait plaint verbalement dans un premier temps « ne pouvant être retenue puisqu’il était l’auteur de la lettre de licenciement ».
Enfin, la Cour d’appel d’Orléans, a considéré que la durée contractuelle de travail journalier était incompatible avec la charge de travail du salarié. Et que celui-ci faisait nettement plus de 39 heures par semaine. Aussi a-t-elle condamné la société employeur à payer au salarié une somme au titre des heures supplémentaires non rétribuées .
Cassation : injurier un client de l’entreprise est une faute grave
La Cour d’appel d’Orléans ayant donné satisfaction au salarié, l’employeur a formé un pourvoi en cassation contre :
- le refus de la cour d’appel de reconnaître la faute grave,
- et contre l’attribution d’une rémunération supplémentaire au salarié au forfait pour des heures supplémentaires.
Les considérants de la Cour de cassation
Injurier un client et le menacer : une faute grave
La Cour de cassation a rappelé que l’arrêt de la cour d’appel énonçait, pour dire le licenciement non justifié, que « les propos du salarié, menaçant de violences un client de l’entreprise, n’avaient pas été pris au sérieux par leur destinataire dès lors qu’il ne s’en était pas plaint immédiatement ». La Cour de cassation a considéré qu’ « en statuant ainsi, alors qu’elle relevait que le salarié ne contestait pas avoir tenu des propos injurieux et menaçants à un client de l’entreprise, de sorte que ces faits étaient de nature à rendre impossible le maintien du contrat de travail et à caractériser une faute grave, la cour d’appel a violé le texte [de loi] ».
Sur les heures supplémentaires
Et puis, concernant les heures supplémentaires : La cour d’appel, pour condamner l’employeur à payer au salarié une somme au titre des heures supplémentaires non rétribuées, avait retenu que la durée contractuelle de travail journalier était incompatible avec la charge de travail. Selon elle, le salarié faisait nettement plus de 39 heures par semaine. Aussi, la Cour de cassation a décidé qu’ « en statuant ainsi, sans rechercher le nombre exact d’heures supplémentaires éventuellement effectuées par l’intéressé, alors qu’elle constatait qu’il présentait des relevés faisant mention d’horaires exagérés, et que le contrat de travail prévoyait une compensation des heures supplémentaires par l’allocation de jours de réduction du temps de travail, la cour d’appel a privé sa décision de base légale ».
Décision de cassation
Par ces motifs, la Cour de cassation a cassé et annulé dans toutes ses dispositions l’arrêt de la cour d’appel d’Orléans, a renvoyé l’affaire devant la cour d’appel de Bourges. De plus, elle a condamné le salarié licencié aux dépens (Cour de cassation, chambre sociale, 13 juillet 2010, N°: 09-42127).
Source de la jurisprudence arrêt de la Cour de cassation : Legifrance.gouv.fr
Résumé :
Les faits d’injurier un client et de le menacer rendent le maintien du contrat de travail d’un salarié impossible et caractérisent la faute grave.
Par ailleurs, les juges doivent évaluer précisément le nombre d’heures supplémentaires effectuées et non payées, ou non compensés. Ils doivent, en effet, justifier la somme au paiement de laquelle ils condamnent un employeur.
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